Jean-Luc Migué, économiste Institut Fraser Profession émérite, ENAP Quebec

Senior Fellow, Institut Fraser et professeur émérite, ENAP - Senior Fellow, The Fraser Institute and professor Emeritus, ENAP, Québec.

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Archives pour juillet 2016

Règles constitutionnelles restrictives, indispensables à la démocratie

Le 15 juillet 2016 par Jean-Luc Migué Laisser un commentaire

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L’histoire du XXe siècle confirme que la moitié de l’Europe a succombé à l’autoritarisme dans les années 20 et 30. La démocratie occidentale est devenue surchargée d’obligations et dominée par les groupes d’intérêt.  Le correctif qui s’impose, révélé par l’histoire du XXe siècle, est que les règles constitutionnelles qui la régissent la circonscrivent rigoureusement. La question première à se poser reste toujours celle de définir son rôle à l’État, pour ensuite l’encadrer de règles qui interdisent le gonflement dont il a fait l’objet au XXe siècle. Force nous est de reconnaître que l’étendue de l’intervention étatique est la mesure de notre échec comme animal social. L’explosion des «droits sociaux» depuis la deuxième guerre mondiale constitue le problème essentiel de l’État moderne. C’est lorsque le commerce entre les hommes devient impraticable que l’État est appelé à intervenir. La coercition d’État est un mal nécessaire aux sociétés libres. Mais il faut voir dans l’explosion de l’étatisme à travers l’Occident depuis cinq décennies, l’expression incontestable de la faillite de nos relations humaines, de notre humanisme. Le vieillissement de la population n’incite guère à l’optimisme à cet égard.

Le moment est venu de persuader les votants et les gouvernements eux-mêmes de mettre un terme à la tendance naturelle de l’État à se gonfler. Significations pratiques? Elles sont trop vastes pour s’insérer intégralement dans ces lignes. Quelques illustrations suffiront. La Suède s’est engagée à équilibrer son budget sur l’étendue des cycles économiques. L’introduction de clauses d’expiration aux lois et aux régulations se conçoit aussi. Un régime où les lois et règlements expireraient après 10 ans ne manquerait pas de freiner la poussée des dépenses en imposant aux gouvernements eux-mêmes de se contrôler. En se rappelant que l’exercice de la politique monétaire par la Banque Centrale s’est avéré une heureuse évolution, on est tenté de retirer aux politiciens certaines décisions pour les confier aux technocrates. L’autorité des banques centrales a abaissé le taux d’inflation en Occident de plus de 20 pour cent en 1980 à près de zéro aujourd’hui. Dans ce contexte, le danger d’évoluer vers la technocratie serait réel; ce qui justifierait le recours calculé et circonscrit à cette formule à un nombre limité de décisions, comme par exemple les pensions. La concession aux autorités locales de fonctions plus nombreuses irait dans le même sens[1][1]. Mais la suggestion la plus puissante découlant de notre analyse consisterait à imposer des règles plus restrictives aux législateurs: par exemple la règle de décision à plus de 50 pour cent des assemblées législatives, aux deux-tiers ou plus, dans toutes les décisions susceptibles de gonfler les budgets et les contraintes aux citoyens. L’adoption de compressions aux budgets et à la fiscalité, elle, se maintiendrait à 50 pour cent. La tâche assignée ne sera pas facile, mais le coût de l’inaction à long terme serait énorme. L’avantage de cette sorte de réforme serait par contre imposant. La société qui l’adopterait prendrait l’avance sur ses voisines aux plans humains et économiques. L’accès à la liberté et aux droits de l’individu constitue la tradition qui a propulsé l’Europe d’abord, les États-Unis ensuite, vers le progrès et la richesse. A cet égard, le Québec étant l’une des communautés qui a le plus souffert de l’étatisme, il a le plus à gagner à réinventer l’État.

Dans son histoire récente, la société québécoise a particulièrement misé sur l’appareil orwellien de l’État pour réaliser le progrès et la prospérité, en gâtant  les riches «baby boomers» de son excessive générosité. Elle a, plus que presque partout ailleurs, combiné le vieillissement de la population et la poussée des coûts de la santé. La vision élitique et discréditée qui a présidé à la révolution dite tranquille, mais qu’on qualifierait mieux de bureaucratique, a entrainé la société québécoise à sa suite, en faveur de l’amplification de nos retards et de l’émigration consécutive. L’occasion est venue de persuader les votants et les gouvernements d’accepter les contraintes constitutionnelles à la tentation naturelle de l’État de se gonfler. La consigne est claire: moderniser, par des règles du jeu pragmatiques, une institution étatique surchargée de responsabilités qui ne lui reviennent pas.

[1][1] Le gouvernement québécois projette déjà d’abaisser ses subventions aux municipalités de 300 millions.

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Catégorie(s) : Articles Étiqueté : démocratie, droits sociaux, étatisme, gouvernement, politique, règles constitutionnelles, régulation, röle

Conclusion: Le capitalisme, seule source de la hausse du niveau de vie

Le 8 juillet 2016 par Jean-Luc Migué Laisser un commentaire

JLM-Capitalisme-Juill16

La piètre croissance du Québec s’avère donc la recette infaillible pour garantir l’émigration de sa population, l’étiolement progressif du français et sa marginalisation ultime. Si le français est menacé, c’est parce que le milieu où s’exprime cette langue languit depuis les années 60 et qu’il offre moins d’opportunities aux Québécois. Peut-on vraiment espérer que le français progresse dans une économie où, faute de dynamisme, la population stagne, le marché de l’emploi est anémique et la croissance s’inscrit en-dessous des territoires qui nous entourent? Toute tentative de balkaniser une société de petite taille au nom de l’identité culturelle ou du multiculturalisme est une menace à la culture qu’on prétend assister. Le fétiche souverainiste est l’expression ultime de cette vision protectionniste de la culture. D’autant plus que la baisse des barrières commerciales a réduit le coût d’être une société de petite taille. Ce qui explique sans doute que le souverainisme ait perdu son audience. Le salut et le rayonnement du français chez nous ne passent ni par l’État québécois, ni par l’État canadien. C’est vous et moi qui ferons l’essor de la culture à la façon de nos ancêtres, non pas la panacée étatiste.

La vision économique, léguée par notre premier maître Adam Smith, repose sur le principe que le commerce libre entre individus et organisations décentralisées est seul capable de créer la richesse et le bien-être. Il en est la pré condition. Selon l’enseignement d’Adam Smith, le progrès économique résulte de contrats entre individus. La civilisation, selon Stuart Mill, ne peut avancer que si les gens jouissent du maximum de liberté de développer leur propre pensée.  Même en acceptant que l’État doive prendre des décisions qu’il faut appuyer, il nous faut reconnaître que chaque intervention diminue la liberté. L’État doit laisser le capital trouver sa plus haute rentabilité; laisser les biens trouver leur prix, la paresse sa punition naturelle, l’industrie sa propre récompense.  Le marché récompense le travail, l’investissement, l’épargne, la productivité, les relations humaines en somme. Une main invisible suscite des comportements socialement et économiquement désirables. Le marché repose sur la responsabilité individuelle. Cette pensée n’est pas l’expression d’une idéologie particulière; elle repose sur l’observation méthodique de la réalité contemporaine. Là où les droits de propriété et la liberté de choisir sont protégés, les marchés modérément libres et le fardeau réglementaire et fiscal léger, le taux de croissance est élevé et l’innovation florissante. Là où le fardeau fiscal, le poids réglementaire et l’instabilité politique sont grands, le progrès économique ralentit[1][1]. Le choix est statistiquement net: croissance et prospérité pour tout le monde par le marché et l’ouverture au monde, ou sous-développement permanent par l’égalitarisme et le redistributionisme d’État.

En 1900, pas un seul pays ne jouissait de ce que l’on considère aujourd’hui une démocratie. En l’an 2000, Freedom House classifiait 120 pays englobant 63 pour cent de la population comme démocratiques. La démocratie, dans ses règles traditionnelles, est la forme de gouvernement la plus favorable à la liberté…sans la garantir cependant. La démocratie du XXIe siècle souffre de problèmes graves. Les économistes de la tradition «public choice», associés à James Buchanan, ont été les premiers à reconnaître ses lacunes, avant même les analystes politiques. Ils ont tôt reconnu que les politiciens démocratiques s’assujettiront aux pressions de leur électorat, comme le confirme l’histoire du XXe siècle. Ils gonfleront les déficits et sous-investiront en infrastructures. On observe d’ailleurs que les votants n’éprouvent guère de respect pour les gouvernements que la démocratie leur a légués. Paradoxalement, ils estiment que la démocratie ne mérite aucune critique. Ils déplorent la pratique, mais ne contestent jamais la théorie. Ils attendent surtout toujours plus de l’État démocratique. En un mot, dédain du gouvernement, mais dépendance accrue à son endroit. Le libre choix en politique ne peut fleurir que sous un régime de libre choix dans le marché.

[1][1]Illustré abondamment dans Micklethwait et Wooldridge, op. cit.

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Histoire de l’étatisme en Occident

Le 2 juillet 2016 par Jean-Luc Migué Laisser un commentaire

JLM-HistEtatisme-juill2016

Le défi politique majeur du Québec, plus que des autres provinces mais comme la plupart des pays d’Europe, est de régler la question de l’État omnivore. L’État en Occident est appelé à dégrossir, par suite du fait que la logique en place suscite le résultat alarmant qu’on connait, une crise fiscale en somme. L’Occident ne connait qu’un modèle depuis la deuxième guerre mondiale, surtout depuis les années 60, soit le gonflement incessant de l’État démocratique. L’égalité des chances est devenue l’égalité des résultats par l’insertion de l’État. L’histoire moderne depuis trois siècles n’a pas toujours suscité cet aboutissement. C’est au XVIIe siècle que l’occident a réalisé l’État nation centralisé. C’était l’époque du premier Léviathan, selon la désignation proposée par Thomas Hobbes. La démocratie libérale apparait et l’Ouest domine les autres régimes, politiquement et économiquement.

Fin du XVIIIe et XIXe siècle, les réformes libérales balaient la royauté et instaurent l’accountability, surtout en Grande-Bretagne. Sous la reine Victoria, la liberté et l’efficacité inspirent l’État. Les droits accaparés par l’État sont comprimés et le fonctionnarisme professionnel s’installe dans la santé et l’éducation, au point que les ressources prélevées par les pouvoirs publics baissent. Au XXe siècle, nonobstant la mondialisation, obstacle supposé au gonflement, et dans le souci déclaré d’améliorer le sort de tous les citoyens, les pays occidentaux inventent le «welfare state»; le reste du monde suit la tendance. Malgré les efforts de Milton Friedman et de Hayek[1][1] après la guerre pour freiner le gonflement de l’État, leur enseignement n’obtient pas un grand succès dans les pratiques effectives. Vers la fin de sa vie en 2004, Friedman en était conscient et formulait le sens de cette évolution dans une phrase expressive: « Après la deuxième guerre mondiale, l’opinion publique était socialiste mais la pratique reposait sur le marché libre; présentement l’opinion est pro marché libre, tandis que la pratique est nettement socialiste »[2][2].

De 1913 à 2011, la part du PIB absorbée par les pouvoirs publics passe de 7,5% à 41% aux USA, de 13 à 48% en Grande-Bretagne et de 10 à 47% dans les 13 pays les plus riches. Le gouvernement américain n’a connu que cinq surplus dans les 54 années depuis 1960; le gouvernement britannique, six depuis 1975. Un nombre élevé de pays portent une dette publique supérieure à 100 pour cent du PIB. A la fin de 2012, les 34 pays membres de l’OCDE étaient propriétaires, en tout ou en partie, de plus deux mille compagnies embauchant une main-d’œuvre de plus de six millions et dotées d’une valeur collective de 2 mille milliards. On estime que les gouvernements de ces mêmes pays détenaient des terres et des bâtiments évalués à neuf mille milliards. L’Institut  Économique de Montréal calcule en temps réel la croissance de la dette intégrale du secteur public du Québec. Il s’agit de la dette brute du gouvernement, à laquelle on ajoute la dette des réseaux de santé et d’éducation, des municipalités et des autres entreprises sous la responsabilité finale du gouvernement. En se basant sur les données fournies par le ministère des Finances dans son Plan budgétaire 2014-2015 (qui excluent la part de la dette fédérale qui revient au Québec), l’IÉDM en vient à estimer que la dette augmentera de 9,3 milliards $ d’ici le 31 mars 2015, ou de 25 millions $ par jour, ou de 17 670 $ par minute, ou de 294 $ par seconde. Elle se gonflera encore davantage dans les prochaines années, sous l’influence du vieillissement de la population. Les industries réseaux, tels le transport, l’électricité, les télécommunications, sont largement nationalisées, sous le douteux prétexte qu’elles constituent des biens collectifs ou des actifs stratégiques. C’est même sous la présidence du républicain George Bush, présumé favorable au rétrécissement de l’État, que les budgets publics américains gonflent le plus rapidement. Malgré la diffusion des services publics de santé et d’éducation, la productivité n’augmente que peu et le vieillissement de la population n’aide pas non plus. Au total, le processus d’explosion de l’État s’avère inhérent à la politique associée à la démocratie. La globalisation et la technologie parviendront-elles à transformer le secteur public. Certains y croient.[3][3] Nous nous en remettons quant à nous aux règles constitutionnelles.

Le Québec recule par rapport aux autres provinces depuis la révolution tranquille; cette évolution s’observe en matière de population, de PIB, et de main-d’œuvre. Le mouvement de la population et du PIB montre que dans l’économie d’une province intégrée à l’économie nationale, c’est dans les quantités plutôt que dans les prix et les revenus par habitant que les ajustements s’opèrent, sauf dans les prix du sol et des services locaux.  Parce que l’offre de sol est une ressource fixe, son prix augmente plus rapidement en Ontario qu’au Québec. Et l’ajustement se poursuit jusqu’à ce que le revenu réel par habitant converge vers le même niveau à travers les deux provinces. La divergence prononcée dans la croissance totale de chacune des deux provinces s’en est trouvée entièrement capitalisée dans le prix du sol et des services locaux. Grâce à la mobilité de la population et à la plus faible croissance de la population québécoise, les résidents québécois ont pu participer à la hausse du standard de vie canadien. Cette évolution comporte cependant un contrepoids: dans la mesure où les Québécois moins mobiles n’ont pas souffert de la baisse du revenu par habitant, dans la même mesure ils sont moins susceptibles de résister à l’envahissement étatique.

 

[1][1] Hayek, Friedrich A., The Road to Serfdom, The University of Chicago Press, 1944.
[2][2] Cité dans Burgin, Angus, The Great Persuasion: Reinventing Free Markets since the Depression, Harvard University Press, 2012, p. 223.
[3][3] Micklethwait, John et Adrian Wooldridge, The Fourth Revolution, The Penguin Press,            New-York, 2014.
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Catégorie(s) : Articles Étiqueté : démocratie, dettes, égalité, Etat, globalisation, marché libre, PIB

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JEAN-LUC MIGUÉ

Jean-Luc MiguéÉconomiste canadien. Maitrise de l’Université de Montréal. Ph.D. de The American University, Washington, DC. Senior Fellow, Fraser Institute, Vancouver. Il a été professeur à l’Université Laval et est Professeur émérite à l’École nationale d’administration publique (ENAP).
Canadian economist. Master’s Degree, Université de Montréal. Ph.D., The American University, Washington, DC. Senior Fellow, Fraser Institute, Vancouver. Was professor at Université Laval. Is now Professor Emeritus, École nationale d’administration publique, (ÉNAP) Quebec City.

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