Jean-Luc Migué, économiste Institut Fraser Profession émérite, ENAP Quebec

Senior Fellow, Institut Fraser et professeur émérite, ENAP - Senior Fellow, The Fraser Institute and professor Emeritus, ENAP, Québec.

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L’avantage démocratique aux groupes d’intérêt

Le 24 septembre 2015 par Jean-Luc Migué Laisser un commentaire

JLM-AvantDemocr

Tous les individus et tous les groupes ne s’engageront donc pas également dans la « course aux faveurs » politiques. Nous avons déjà établi qu’une mesure même impopulaire auprès de la majorité sera retenue par les décideurs politiques si elle s’avère très populaires auprès d’une minorité. Ce qui nous a justifiés de conclure que ce n’est que par hasard que la règle du scrutin majoritaire réalise le bien commun.

La règle générale que retient l’économiste pour prédire l’intensité de la participation veut que les gens ne s’adonnent à l’action politique que dans la mesure où les bénéfices attendus des politiques recherchées l’emportent sur les coûts. Ils ne se consacrent à une initiative de lobbying, à la vie d’un comité de citoyens ou à une manifestation dans les rues, que si l’impact prévu justifie l’investissement de temps, d’énergie et d’argent que l’opération comporte. Alternativement, il s’avère difficile d’organiser un grand nombre de votants pour ou contre une mesure qui n’entraîne que des effets mineurs sur eux. Toutes les parties affectées par les choix politiques ne siègent donc pas à la table de négociation. Si la politique est l’art du compromis, elle est surtout l’art du compromis sélectif. C’est la réalité de ces coûts qui expliquent que l’action politique soit principalement le fait de groupes organisés.

Les citoyens appartiennent à des groupes multiples définis par l’occupation, l’industrie, le revenu, la géographie, l’âge ou quelque autre caractéristique. L’influence politique des groupes sert à promouvoir les intérêts de leurs membres. On peut définir les groupes d’intérêt comme des regroupements organisés de votants (ou d’entreprises) ayant des préférences semblables pour une politique spécifique. En concentrant leur lobbying sur une mesure particulière, ces groupes peuvent gagner l’adoption d’une politique qui leur vaut des bénéfices directs, tout en en diluant le coût sur des millions de contribuables ou de consommateurs. Ces groupes seront donc disposés à engager des ressources pour obtenir des mesures qui les favorisent. On désigne le fardeau de ces investissements qui ne servent qu’à opérer des transferts de richesse, comme la course aux faveurs ou aux rentes.[1] Concrètement, ces « investissements politiques » prennent la forme de contributions à la caisse électorale et à la propagande du parti, de lobbying en faveur de causes privilégiées, de marches dans les rues, de lettres aux journaux. Le processus politique n’est pas gratuit. Cette dissociation entre les bénéfices et les coûts donnera lieu à un niveau inefficace de dépenses ou de taxes. Le coût social de la politique l’emportera sur les bénéfices.

« Est-ce l’activité des groupes
qui suscite le gonflement de l’État,
ou l’expansion de la taille de l’État
qui entraîne l’activisme des groupes? »

La tradition analytique introduite par Olson (1965) explique difficilement que les groupes puissent se former. En raison du problème du « passager clandestin » (free rider), il peut s’avérer irrationnel, même pour les individus qui y gagneraient au lobbying, de participer à l’opération, puisqu’ils y gagneront de toute façon, même en s’en excluant. Autre question non parfaitement résolue : Est-ce l’activité des groupes qui suscite le gonflement de l’État, ou l’expansion de la taille de l’État qui entraîne l’activisme des groupes? (Mueller et Murrel, 1986) Il reste qu’on compte par dizaines les écrits théoriques et empiriques sur le lien entre l’activité des groupes de pression et la taille de l’État. (Ekelund et Tollison, 2001) Entre autres, Sobel (2001) construit un solide dossier empirique sur la relation positive entre les PAC (political action committees) et le budget de dépenses du gouvernement fédéral américain. Face à la majorité rationnellement silencieuse, les groupes déjà organisés jouissent d’un avantage certain. L’agriculteur membre de l’UPA sait mieux que le consommateur de lait l’étendue des contrôles exercés sur la production de cette denrée. Les dirigeants d’entreprises et leurs syndiqués connaissent mieux que leurs acheteurs les restrictions tarifaires qui les affectent. Pour une organisation déjà en place et ses lobbyistes, pour une association de producteurs, un syndicat, un regroupement de votants géographiquement circonscrits, les ressources supplémentaires à engager pour influer sur les décisions publiques restent minimes, tandis que les bénéfices peuvent s’avérer énormes.

 

[1] La mesure théorique rigoureuse de ce transfert devient pur gaspillage.

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Catégorie(s) : Socio-politique Étiqueté : citoyens, classe moyenne, économie, étatisme, gouvernement, politiciens, politique, pouvoirs publics, société, votants

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JEAN-LUC MIGUÉ

Jean-Luc MiguéÉconomiste canadien. Maitrise de l’Université de Montréal. Ph.D. de The American University, Washington, DC. Senior Fellow, Fraser Institute, Vancouver. Il a été professeur à l’Université Laval et est Professeur émérite à l’École nationale d’administration publique (ENAP).
Canadian economist. Master’s Degree, Université de Montréal. Ph.D., The American University, Washington, DC. Senior Fellow, Fraser Institute, Vancouver. Was professor at Université Laval. Is now Professor Emeritus, École nationale d’administration publique, (ÉNAP) Quebec City.

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