Jean-Luc Migué, économiste Institut Fraser Profession émérite, ENAP Quebec

Senior Fellow, Institut Fraser et professeur émérite, ENAP - Senior Fellow, The Fraser Institute and professor Emeritus, ENAP, Québec.

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Rôle des investissements transfrontaliers et des multinationales

Le 27 mai 2016 par Jean-Luc Migué Laisser un commentaire

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Aux yeux des fanatiques de l’anti globalisation, les multinationales incarnent l’essence de «l’exploitation» capitaliste. La raison qu’ils invoquent est précisément ce qui fait leur force et ce  par quoi elles apportent la plus grande contribution au  bien-être des populations du monde sous-développé comme de nos économies industrialisées. Dans la perspective étatiste courante, tout ce qui gêne la discrétion des gouvernements nationaux et locaux est à déplorer. Or les multinationales, plus que leurs semblables locales, contrecarrent par leur mobilité le discrétionnaire des décisions publiques. A ce titre, elles représentent une force de résistance au poids de l’État.

Des 100 plus grandes économies du monde présent, il s’en trouve 47 qui sont des États nations. Les 53 autres sont des entreprises multinationales.  C’est ainsi qu’Exxon Mobil Corp., la  plus grande société mondiale par ses ventes, touche des revenus annuels supérieurs au PIB des 220 pays du monde, à l’exception des 20 plus grands d’entre eux. (Gabel et Bruner, 2003)  La population mondiale des multinationales atteignait les 62 000 unités en 2000, accroissement de neuf fois supérieur aux 7 258 unités qu’on recensait en 1969. Dans les cent ans qui ont précédé, leur nombre avait à peine triplé. Elles et leurs filiales embauchent 90 millions d’employés à travers le monde et versent plus de 1,2 mille milliards en taxes aux gouvernements. Les investissements étrangers directs ont explosé dans les 30 dernières années pour atteindre les 112 milliards de dollars, de 6 milliards qu’ils représentaient. Cet aboutissement résulte du progrès des communications, des relations bancaires et surtout de l’abaissement des tarifs douaniers.

Les multinationales possèdent deux caractéristiques, relativement à leurs contreparties nationales: elles sont plus efficaces, ce qui leur permet d’offrir des conditions plus avantageuses à leurs employés, et elles déplacent leurs investissements et les emplois plus allègrement en fonction de leur rentabilité. En Amérique comme en Asie, la probabilité de fermer boutique lorsque les conditions l’imposent est plus élevée  pour les multinationales que pour les firmes locales (de 20% en Indonésie et de 3% en Amérique). (Bernard et Sjoholm, www.nber.org/papers/w10039) Par l’effet de cette caractéristique, elles peuvent plus facilement se soustraire aux caprices des politiques nationales redistributionnistes. L’ensemble de la population a tout lieu de se réjouir de cette incidence. Les groupes d’intérêt qui s’alimentent aux budgets publics et les activistes s’en indignent.

Il faut savoir ce qu’ont en tête les activistes lorsqu’ils parlent de dictature «libérale» mondiale. Leur premier homme de paille réside dans la toute puissance de ces multinationales. La grande erreur initiale de la pensée reçue est de croire que les hommes d’affaires sont les premiers défenseurs de la libre entreprise. Le fait est que dans la mesure où les gens d’affaires s’engagent en politique, ils épousent comme les autres intervenants une version quelconque du redistributionnisme en faveur de groupes particuliers, quand ils ne se font pas carrément les promoteurs de l’alarmisme écologique fanatique. La position pro libre entreprise ne saurait se confondre à la thèse pro business. La plupart des anti globalistes de leur côté appartenant au secteur public ou aux monopoles syndicaux, ils n’ont pas idée de la force de la concurrence dans un monde global dynamique et novateur. La concentration industrielle diminue, et donc la concurrence s’intensifie avec la globalisation. Contrairement aux enseignements du célèbre fumiste que fut John Kenneth Galbraith dans les années 60 à 80, ni les entreprises ni les multinationales ne sont devenues plus puissantes que le marché. La moitié des firmes qui figuraient dans la liste de Fortune 500 en 1980 étaient disparues en 1990. Grâce à la réglementation d’État, les propriétaires de taxis de Sainte-Foy (et d’ailleurs) jouissent d’un pouvoir économique supérieur à la plus puissante des multinationales. Nous en voulons pour preuve le fait que le prix des services de taxi est de 40% et plus supérieur au coût de production. La valeur (artificielle) d’un permis s’établit autour de 75 000$. En d’autres termes, dans un marché non protégé, la valeur des permis tomberait à zéro et les prix de plus de 40%, sous la pression des nouveaux venus qui envahiraient leurs platebandes. Au Canada les salaires des syndiqués sont de plus de 30% supérieurs au salaire concurrentiel (de 18%, une fois normalisés); les prix agricoles réglementés, souvent de plus de 100% supérieurs au prix concurrentiel. À part dans les monopoles publics, on ne connaît pas de producteurs qui peuvent empocher en permanence une rente de cette ampleur.

La virulence de cette mixture d’intérêts de la gauche et des syndicats en particulier, qui manifestent contre le capitalisme mondial, témoigne du fait qu’ils ont perdu la guerre. Il faut s’en réjouir. Les manifestants de Seattle, de Québec et de Doha dirigeaient leurs attaques contre ce qu’ils percevaient comme la domination américaine. Toute cette engeance qui s’institue défenseur de notre bien-être sans invitation, manque ainsi la réalité d’une évolution fondamentale: S’il est vrai que 60% des plus grandes corporations du monde avaient leur base aux États-Unis en 1962, seulement 185 des 500 plus grosses multinationales ont aujourd’hui leur siège social dans ce pays. L’Union Européenne en compte 126, le Japon 108. La cimenterie mexicaine Cemex se range parmi les trois plus grandes.

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Catégorie(s) : Articles Étiqueté : concurrence, Emploi, Etat, exploitation, Industries, multinationale, politique, syndicalisme

Protectionnisme et préjugés anti importation

Le 20 mai 2016 par Jean-Luc Migué Laisser un commentaire

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Malheureusement, au plan politique, l’ignorance rationnelle des gens suscitera la perception d’une asymétrie entre exportations et importations. La restriction à l’importation entraîne directement des effets positifs et concentrés dans l’industrie protégée, mais des effets diffus et négatifs pour les consommateurs et les exportateurs. Les gains d’emplois sont évidents, tandis que les pertes découlant de la baisse des exportations se distribuent à travers la multitude des industries touchées. Le coût est diffus parce que porté par les entreprises d’exportation et leurs employés, de même que par les consommateurs. Les industries victimes de l’importation éprouvent plus le souci d’appeler au redressement politique et obtiendront pour cette raison l’oreille attentive des politiciens. Les industries d’exportation victimes de pertes marginales d’emplois et les consommateurs qui paieront quelques dollars de plus pour leurs achats peuvent ne pas même s’en rendre compte. Donc peu d’incitation à organiser la résistance politique au protectionnisme. Dans l’affrontement entre les libre-échangistes et les protectionnistes, ces derniers partent gagnants dans l’arène politique.

B. Caplan (2007) interprète l’appui généralisé en faveur du protectionnisme comme une exception au principe de la domination fréquente des groupes d’intérêt. Il note que depuis 1976 le nombre de ceux qui jugent les tarifs douaniers nécessaires l’emportent de loin sur ceux qui sympathisent avec le libre-échange. Il constate de même que le protectionnisme agricole reste populaire à 58%. Quatre-vingt pour cent des Américains souhaitent la hausse du salaire minimum. Dans notre perspective, la fausse perception des votants relève de l’ignorance rationnelle. Elle explique, on s’en souvient, que l’appui à ces politiques s’inspire de la pensée groupiste et elle donne bonne conscience aux tenants de la pensée anti marché. Elle explique également qu’en l’absence d’une analyse rigoureuse inconciliable avec l’ignorance rationnelle, les gens sous-estimeront les bénéfices sociaux du libre marché, particulièrement en matière d’échanges internationaux et de marché du travail. De toute façon, le débat public sur chaque question reste invariablement dominé par les groupes d’intérêt eux-mêmes qui ne manquent pas d’investir temps et argent pour perpétuer ce biais.

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Catégorie(s) : Articles Étiqueté : export, import, Industries, libre-échange, préjugés, protectionnisme

Réglementation, avantages pour les producteurs, fardeau pour les consommateurs

Le 25 mars 2016 par Jean-Luc Migué Laisser un commentaire

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Le fardeau administratif direct que représente l’armée de fonctionnaires qui s’activent à la tâche de nous contrôler ne comprend qu’une fraction minime du coût global de ce déchaînement bureaucratique. On conçoit que les membres de l’industrie régulée, propriétaires, managers et syndiqués organisés, se fassent les protagonistes enthousiastes de cette conspiration et que le politicien se montre attentif à leurs pressions. La création du cartel a pour effet de transformer une industrie concurrentielle en monopole. Toutes les réglementations sectorielles qui ont de tout temps perpétué des raretés coûteuses et des prix artificiellement gonflés s’inscrivent dans la même logique. On recouvre ainsi les industries agricoles (lait, volailles, céréales et oeufs au Canada), celles du camionnage (historiquement), du taxi, de la téléphonie et de la radiotélévision, des institutions financières. La collusion implicite est imposée à tous les membres par la régulation. La formation d’un cartel est en principe une opération illégale, sauf si elle se fait avec l’assentiment du législateur, et même grâce à ses bons offices. C’est le ministère lui-même qui se fait garant de sa mise en œuvre et de sa permanence.

La fixation des prix est tentante pour les politiciens parce qu’elle se fait surtout aux dépens du grand nombre de consommateurs qui écopent chacun d’un fardeau si minime qu’ils n’ont pas le souci de s’engager dans une résistance organisée. Au prix de quelques centaines de dollars par année imposés à la masse de consommateurs de lait, de services de télécom ou de taxis, chacun des quelques milliers d’offreurs encaisse un revenu supplémentaire qui peut atteindre des milliers, voire des dizaines de milliers de dollars. Même la réglementation des ressources environnementales ne se comprend souvent que comme le moyen de protéger les producteurs organisés et les bruyants écologistes sur le dos de la population. Ainsi, la suppression des titres de propriété sur l’eau réservés historiquement aux riverains a valu pendant la première moitié du XXe au complexe industrialo-syndical l’accès gratuit à cette précieuse ressource devenue conséquemment le dépotoir privilégié des industries. La pratique discriminatoire d’imposer des normes environnementales uniformes a valu aux grosses entreprises syndiquées des avantages concurrentiels énormes, du fait qu’il en coûte jusqu’à dix fois plus cher aux petites et moyennes entreprises de satisfaire à une même norme. Dans chacun de ces cas, on pourrait démontrer qu’en dépit du fait que la somme des pertes des consommateurs l’emporte de loin sur la somme des gains des producteurs, le caractère concentré des intérêts des producteurs fait qu’il s’avère politiquement rentable de leur donner la priorité.

L’Institut Fraser calcule que la seule régulation fédérale ajoute annuellement plus de 60 milliards au coût des biens et services que le consommateur doit supporter. C’est environ 6 500$ de déboursés supplémentaires pour la famille canadienne moyenne. Combiné à la multitude de décrets provinciaux tout aussi envahissants, et qui touchent toutes les dimensions de nos vies, depuis la largeur des échelons d’une échelle en milieu de travail jusqu’à l’horaire des arrosages sur nos pelouses, on découvre que le fardeau sur la famille moyenne s’approche des 13 700$ par année.

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JEAN-LUC MIGUÉ

Jean-Luc MiguéÉconomiste canadien. Maitrise de l’Université de Montréal. Ph.D. de The American University, Washington, DC. Senior Fellow, Fraser Institute, Vancouver. Il a été professeur à l’Université Laval et est Professeur émérite à l’École nationale d’administration publique (ENAP).
Canadian economist. Master’s Degree, Université de Montréal. Ph.D., The American University, Washington, DC. Senior Fellow, Fraser Institute, Vancouver. Was professor at Université Laval. Is now Professor Emeritus, École nationale d’administration publique, (ÉNAP) Quebec City.

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