Nous nous en remettrons sur ce sujet à l’étude publiée récemment par la Banque Mondiale (2003). Les résultats confirment que la centralisation des négociations associée à la monopolisation publique et aux décrets ralentit les dépenses de recherche et de développement et réduit l’activité économique générale par le gonflement des salaires et des avantages sociaux. Souvent, elle ralentit la croissance de la productivité. La permanence d’emploi s’installe. Enfin, les conditions générales de travail (permanence, congés payés, congés de maladie, régime de retraite, longueur des heures de travail) l’emportent progressivement sur celles des travailleurs non soumis à cette forme de monopole de négociation.
La collectivisation des négociations s’exprime dans des contrats qui opposent des obstacles permanents au professionnalisme du personnel médical et au rendement. On assiste à la rigidification des horaires et des classifications qui gênent la créativité et l’excellence. Les clauses d’ancienneté se substituent à la compétence dans l’avancement. Les règles d’évaluation sont adoucies, quand elles ne sont pas purement absentes et le congédiement pour incompétence exclu. L’échelle des salaires récompense l’âge plutôt que le talent, exclut souvent toute forme d’incitation à l’excellence et interdit à la direction de récompenser l’effort supplémentaire et le succès.
Comme le rappelle R. Brenner (2001), la distribution des salaires se rétrécit aussi aux dépens des plus talentueuses et des plus dynamiques des infirmières.
Politique industrielle et subventions aux entreprises
À la différence de la monopolisation pure, la politique industrielle constitue un moyen indirect de subventionner les producteurs en pénalisant les contribuables. Tous les gouvernements prétendent pouvoir faire mieux que le marché pour déceler d’avance les industries gagnantes. Tous ont fait la preuve qu’il s’agit d’une illusion coûteuse.[1][1]
Les chefs du gouvernement canadien réaffirment régulièrement leur foi inébranlable dans une stratégie industrielle nationale pour l’automobile, de même que pour l’industrie aérospatiale à qui ils promettaient leur prodigalité par le Technology Partnership Canada en faveur de l’aérospatial et de la défense.
Ce dernier organisme a depuis 1996 approuvé plus de 3 milliards en « contributions » au secteur privé. Comme il s’agissait en principe de « prêts » remboursables à même les rendements fabuleux des investissements, les estimations initiales prévoyaient le remboursement de 80%. La réalité révèle que c’est moins de 5% que les contribuables ont récupéré (Williamson 2006). Au même moment, le Comité des Communes sur l’Industrie concentrait arbitrairement son attention sur trois secteurs : le pétrole, le textile et le vêtement. Pas précisément des industries de pointe. Pourquoi ces trois industries plutôt que d’autres, bien malin qui pourrait y répondre. Le seul gouvernement canadien a gaspillé environ $5 milliards de fonds publics par année en faveur des entreprises et des agriculteurs, injectés par les tubes intraveineux que sont les agences régionales (dont le Bureau fédéral de développement régional—Québec), les politiques industrielles, les programmes d’infrastructure et de promotion technologique, les politiques de ressources (Hibernia) et de transport (rachat du programme de subvention au transport des céréales de l’Ouest), sans compter les budgets de la Corporation de développement des exportations.
Le régime de quasi monopole public qui régit nos forêts a valu des milliards de subventions à l’industrie du papier et du bois d’œuvre en droits de coupe artificiellement bas et en interdiction d’exporter le bois en billes. Il nous a aussi valu 25 ans de conflits perpétuels avec les producteurs américains. Le règlement intervenu en 2006 tient du même arbitraire, mais laisse au moins la porte ouverte à un régime de propriété privée si les provinces s’avisaient de s’en prévaloir.