Introduisons dès maintenant un concept central de la théorie économique de la politique, l’ignorance rationnelle.[1]
Lorsqu’un individu achète une voiture, les deux conditions à l’adoption du choix rationnel sont remplies : le choix individuel est décisif et l’enjeu personnel est grand. Son intérêt de consommateur est de choisir la voiture qui lui convient le mieux. La prudence et le grand soin s’imposent à lui. Il acquerra rationnellement l’information optimale. Supposé maintenant que la marque de voiture qu’il conduira soit déterminée, non par son choix particulier, mais à la majorité. L’enjeu pour lui reste aussi grand, mais son pouvoir sur les caractéristiques de la voiture qu’il obtiendra devient pratiquement nul. Il perd tout intérêt à acquérir l’information pertinente à l’achat.
Il s’ensuit souvent qu’une large fraction de la population ne saura jamais qu’une institution ou une mesure législative leur inflige des dommages réels. Les politiciens sont conscients de cette lacune et concevront leurs politiques pour attirer des votants mal informés.
[1] Les réflexions qui suivent s’inspirent surtout de Boudreaux, Donald J. et Eric Crampton, « Truth and Consequences: Some Economics of False Consciousness », The Independent Review, été 2003, pp. 27-46.
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